vendredi 30 mai 2008

POUVOIR D'ACHAT HAUSSE OU BAISSE ??

Vendredi 30 Mai 2008

Hausse ou baisse du pouvoir d'achat ?
Dans une étude récente, "Une autre vision de l'évolution du pouvoir d'achat: le pouvoir d'achat par heure de travail", l'institut pour un développement durable (IDD) mesure l’évolution du temps de travail nécessaire pour acheter différents biens de consommation et constate qu’il faut travailler moins de temps en 2008 qu’en 1988 ou en 1983 pour acheter une sélection de produits.

Si la présentation des résultats séduit par sa simplicité et sa concision, une lecture trop rapide des résultats laisse croire qu'aucune perte de pouvoir d'achat n'est apparue depuis 25 ans.

Les limites méthodologiques
Toute étude porte en soi ses propres limites. C'est en les identifiant qu'une étude développe sa portée scientifique. Ainsi, comme le souligne l'auteur, "cette méthode, bien intéressante, n'est pas évidente à mettre en œuvre, ne serait-ce que parce qu'elle nécessite de calculer, pour différentes années, un salaire horaire net et d'avoir des produits plus ou moins comparables dans le temps".

Portant sur la comparaison du salaire moyen, du temps de travail et de la consommation, il convient avant toute conclusion d'identifier la portée des indicateurs retenus, en tenant compte du fait que les indicateurs pour être comparables, ne peuvent avoir été modifiés au cours des 25 dernières années et qu'il n'est possible de n'utiliser que les indicateurs disponibles.
Le calcul du salaire m! oyen
Cette analyse repose sur l’évolution du salaire horaire moyen et sur l'évolution du temps de travail hebdomadaire moyen. Les indicateurs retenus ne concernent que les personnes qui travaillent et, sont basés sur des données moyennes qui ne permettent pas de prendre compte les disparités qui existent au sein de la population des gens qui travaillent. Ce n'est pas parce qu'un revenu moyen augmente que tous les revenus augmentent dans les mêmes proportions. Il suffit pour s'en convaincre de constater que les augmentations salariales des dirigeants de grandes entreprises ont augmenté plus rapidement que le salaire moyen. Cet indicateur synthétique exclut malheureusement les personnes ne disposant pas d'un salaire comme les allocataires sociaux.

Le temps de travail hebdomadaire
Cette notion intègre non seulement la totalité des heures prestées y compris les heures supplémentaires, non choisies par le travailleur mais aussi les gains de productivité réalisés au cours de 25 dernières années. Il est donc logique que ces gains de productivité se soient traduits par une augmentation du pouvoir d'achat, même si celle-ci demeure légère.

La consommation
A travers 13 produits illustratifs, l'étude étudie le pouvoir d'achat par heure de travail. Encore faut-il que la comparaison soit identique. Or les produits retenus ont évolués au cours de 25 dernières années et ne sont plus comparables.

D'une part, car les produits se sont transformés. Ainsi, si en 1983, le pain de ménage (1000 gr) composait le quotidien des consommateurs, en 2008, le pain amélioré (800 gr) l'a remplacé. Au rayon des pâtisseries, le gâteau moka a de moins en moins la cote, remplacé par des produits à la crème fraîche ou plus allégés. Les œufs d'élevage en batterie sont de plus en plus difficiles à trouver dans les magasins. L'emballage du lait a connu de réelles modifications passant de la bouteille en verre au tétrapack ou à la bouteille PET. Les pommes de t! erre ne sont plus identiques. En 1983, achetées à la ferme, en vrac (25 kg), elles sont aujourd'hui triées, lavées et disponibles en sachet de taille modeste. Peut-on encore comparer le prix de produits si différents ?D'autre part, car le panier de la ménagère a évolué L'observatoire de la consommation alimentaire a ainsi montré qu'en un demi-siècle, la consommation de pommes de terre avait chuté de 40%, de produits laitiers de 40%, de beurre avait été divisée par deux tandis que la consommation de viande augmentait de 70% et celle de fruits et légumes de 30%.
La mesure à long terme
Toute mesure à long terme a tendance à lisser les évolutions et à masquer les variations au cours de la période. D'autant qu'il convient de s'interroger sur la portée des indicateurs statistiques utilisés. La mesure de l'évolution du pouvoir d'achat par heure de travail ne peut constituer à elle seule un indicateur pertinent du bien-être d'une nation et de chacun de ses citoyens. Sans doute conviendrait-il d'y inclure d'autres éléments comme la qualité du cadre de vie, notamment. Notons aussi que les écofrictions sur les prix et l'apparition des "travailleurs pauvres" ne sont pas intégrés dans les données de l'étude.

L'interprétation des résultats
Assez étonnement, l'étude scientifique présentée par l'IDD ne propose aucune conclusion (!). Au lecteur sans doute, d'interpréter des données qui demandent une lecture en profondeur pour être signifiantes.

Le pouvoir d'achat a bien diminué
L'étude de l'IDD confirme d'autres études antérieures selon lesquelles le pouvoir d'achat a bien diminué. En effet, elle montre que les gains de productivité engrangés au cours des 25 dernières années ont à peine permis une légère augmentation du pouvoir d'achat, augmentation qui a disparu au cours des derniers mois. D'autres études confirment ce constat.
Deux études du CRIOC, 1996-2005 : 10 ans de pouvoir d'achat et La consommation des ménages à revenu modeste montrent, comme d'autres publications de l'IDD qu'il existe bien une diminution réelle du pouvoir d'achat.
A côté des déclarations de Philippe Defeydt, lui-m&ecir! c;me, « Depuis 2004, date de la mise en place du nouvel indice des prix à la consommation, les petits revenus ont perdu jusqu’à 400 € de pouvoir d’achat sur une base annuelle. » et pour l’ensemble de la population, il constate même une « quasi-stagnation tendancielle du pouvoir d'achat par unité de consommation entre 2000 et 2006. », la réalité quotidienne vécue par les consommateurs (augmentation des prix des matières premières et de l'énergie, notamment, inflation en hausse) et la plupart des indicateurs statistiques confirment une baisse du pouvoir d'achat :

14,7% de la population belge ne dispose pas d'un revenu de 860€/mois pour un isolé et de 1805€/mois pour un ménage (2 adultes, 2enfants) et, globalement, depuis 1990 l'inégalité de revenu mesurée sur la base des statistiques fiscales est en hausse.
En 2007, 338.933 personnes étaient qualifiées de surendettées. Ce chiffre concerne uniquement les crédits à la consommation et les emprunts hypothécaires. Les arriérés de loyer, les dettes dans le secteur des soins de santé, des télécommunications, de l'énergie etc. ne sont pas pris en compte.
En 2006, le nombre de bénéficiaires du droit à l'intégration sociale approchait les 88.000. Environ 78.000 d'entre eux recevaient un revenu d'intégration.
La consommation est différenciée et duale.
Les données analysées (et disponibles) ne permettent pas d'identifier le gain de pouvoir d'achat par catégorie de revenus ou groupe social. Or, depuis plusieurs années, le CRIOC constate, dans la majorité des études réalisés que les groupes sociaux consomment différemment et que le revenu, la formation et le métier exercé influencent de manière déterminante les choix de consommation. L'étude récente consacrée à la consommation des revenus modestes confirme, à travers l'analyse de 180 indicateurs en matière de consommation et d'achats que la consommation des ménages à revenus modestes est différente des ménages à revenus élevés.

Ainsi, à titre d'exemple, citons que les consommateurs &agra! ve; revenu modeste disposent d’un confort moindre, que se chauffant plus souvent au mazout, l’impact de l’augmentation des prix est plus importante sur ces derniers, que Le loyer payé en valeur absolue est moins important mais constitue une part proportionnellement plus importante des revenus, que leur accès à la propriété demeure plus difficile que pour les autres catégories de revenus.D'autres études ont par ailleurs confirmés cette différenciation de consommation :
Les ménages aux revenus les plus faibles consacrent la majeure partie de leur budget au logement (jusqu'à 39% pour le 1er décile), à l'alimentation, au tabac et aux boissons (17%).
En 2007, 108.100 personnes ont fait appel à une des neuf banques alimentaires. Elles étaient 70.000 en 1995, 91.000 en 1999 et près de 107.000 en 2006.
Les ménages vivant sous le seuil de pauvreté dépensent en moyenne EUR 20.017,21 par an. Ce chiffre s’élève à 33.711,77 euros pour les ménages vivant au-dessus du seuil de pauvreté. L’écart de dépenses entre eux s’élève donc en moyenne à 40,6%. Ils réalisent des économies sur tous les postes de dépense, à l’exception du tabac. En moyenne, les dépenses en tabac des ménages vivant sous le seuil de pauvreté dépassent de 4,5% celles des ménages vivant au-dessus du seuil de pauvreté.
Les voyages touristiques sont le poste sur lequel les ménages pauvres se serrent le plus la ceinture. Parmi les autres postes sur lesquels les ménages vivant sous le seuil de pauvreté grappillent fortement, l’on trouve le transport privé (la voiture) et l’aménagement de la maison. Les ménages sous le seuil de pauvreté limitent aussi fortement leurs dépenses dans les cafés et les restaurants ainsi que dans les activités culturelles et de loisirs. Ils déboursent en moyenne moitié moins en habillement et soins corporels que les ménages vivant au-dessus du seuil de pauvreté.
Par contre, les économies réalisées sur les denrées de base par les ménages vivant sous le seuil de pauvreté sont moins prononcées. Ils ne dépensent en moyenne ‘que’ 25,8% de moins en l’alimentation, 34,5% en boissons, 18,3% en loyers et 18,9% en chauffage. Ils dépensent 35,4% de moins en soins de santé.
Ceci signifie donc bien que, proportionnellement à leurs revenus, les ménages les plus pauvres dépensent une part plus importante à l’alimentation, le loyer et au chauffage que les ménages plus aisés !
A la lecture des résultats, il convient donc de s'interroger sur la répartition des gains de pouvoir d'achat entre les groupes sociaux et les différents types de revenus.
Les besoins ont changé
Aujourd'hui, les modes de vie ont changé. Les besoins des consommateurs ont évolué et la société s'est transformée. Comparer le pouvoir d'achat par heure de travail n'a de sens qu'en tenant compte de cette évolution.

Conclusions
Même si cette étude de l'IDD est proche de l'exercice de style, elle relativise les problèmes liés au pouvoir d'achat mais ne montre pas les disparités présentes au sein de la population. Elle laisse penser que l'augmentation du prix des produits apparue au cours de ces derniers mois aurait balayé 25 ans de croissance (légère) de pouvoir d'achat et minimise l'urgence d'une action rapide en faveur des consommateurs les plus démunis.

Sources
Ph Defeyt (IDD), mai 2008, "Une autre vision de l'évolution du pouvoir d'achat: le pouvoir d'achat par heure de travail" http://www.iddweb.eu/docs/prixproduits.pdf

Ph Defeyt (IDD), "Indice des prix, indexation et pouvoir d’achat des ménages à petits revenus" http://www.iddweb.eu/

Ph Defeyt (IDD), novembre 2007, "L'évolution du pouvoir d'achat par unité de consommation entre 1995 et 2006" http://www.iddweb.eu/docs/RevDisp.pdf

SPF Economie (14 mars 2008), "1,5 million de Belges sont pauvres - Le taux de pauvreté reste stable" http://www.statbel.fgov.be/press/pr117_fr.pdf

SPF Economie (16 octobre 2007), "Qui sont les pauvres en Belgique?" http://www.statbel.fgov.be/press/pr106_fr.pdf

Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l'exclusion sociale http://www.luttepauvrete.be



Contact au CRIOC:
Marc Vandercammen, directeur général, 0475/78 44 51
Service d'étude, Ariane Godeau, 02/54706081
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2 commentaires:

Anonyme a dit…

Commentaires très intéressants sur le pouvoir d'achat

Dommage que les citoyens n'en discutent pas suffisamment

Ces études ont commencé avant la seconde guerre mondiale

Des économistes tels que
Colin Clark (USA),...et surtout le français Jean Fourastié
ont montré l'importance du développement de la technique dans les secteurs primaire, secondaire et tertiaire.

Jean Fourastié a été l' inventeur du terme "les 30 glorieuses" (période 1945 à 75) .

Il avait prévu les difficultés actuelles .

Il a aussi essayé de mettre l'économie à la portée du citoyen moyen.

Concernant le débat actuel:

pouvoir d'achat/ augmentation ou non des prix

Que le citoyen lise attentivement les indices de consommation, de santé, il concluera vite

Que le citoyen compare le prix de chaque produit par rapport à son salaire sur diverses périodes, il concluera vite


que l'homme au faible revenu ( moins de 1600 E annuels nets)a des difficultés pour vivre m^me si le prix réel d'une grand nombre de produits peut être resté stable

Que le citoyen compare ces produits par rapport au revenu d'une Justine Henin par exemple

Il concluera vite que l'homme au revenu modeste ne vit pas sur l'or actuellement:

la vie coûte de plus en plus cher

les prix de l'immobilier ont flambé, les frais pharmaceutiques et médicaux, l'alimentaire, l'essence etc ne cessent de grimper

Que faire? Essayer de s'informer, de découvrir la vérité en groupe


Robin des bois se retire dans la campagne pour étudier ces faits socio-éconemiques en pensant aux moins aisés qui doivent aussi se dire que l'économie est faite et doit être comprise par tout homme

RB félicite le groupe UDP qui essaye de faire ouvrir les yeux aux citoyens responsables

RB espère qu'il ne sera pas le seul à réagir

Anonyme a dit…

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